entre noir #8
on a vécu sans toucher loin
portée de main, portée de bras
dans le même diamètre. on a poursuivi
*
on s'est prolongé du peu possible
on a continué de poursuivre
pour s'arrêter et reprendre. reprendre
et s'arrêter de poursuivre
*
une vie de retard déjà et à venir pas une autre
pour celle-là c'est plié pas la bonne
*
stratifié sans savoir couche après couche
efface la précédente, efface ne se voit
plus bientôt
bientôt plus. ne se voit plus
*
tape dur sec derrière le front. dans les fosses
on sent quand ça vient contre cogner pour rien
traverser les strates de béton il faut pouvoir
on s'est muré tant à mesure
*
derrière ça respire il paraît
derrière c'est ce qui se dit
à fendre les os il paraît, à fendre les pierres
derrière c'est ce qui se dit
*
si cru dans le noir qu'on plonge maintenant le corps
on reste séparé. c'est encore ça le plus dur
le dur entre les épaisseurs. ce qu'on est en vrai
la part qui a reculé derrière les mots, profond
*
beaucoup de vides espaces trous
on fabrique avec des lieux
où vivre petit, à doses faibles
on parle calme alors seul. seul donc
― là surtout sans retour
*
craque l'os trop près on touche
on se fourre avec la main en dedans
on arrache du noir. tout le noir qu'on peut
résister c'est pour la forme juste
au fond on en jouit
*
et pour la nuit quand ça avance
reste ce fond, reste ce reste à volume rien
une musique on dirait. ça y ressemble
ça revient la nuit crever la voix
*
restent alors des mots pas dits
on se rend compte, pas grave
― mal visibles c'est mieux
Jean-Marc Undriener