Nuits-fakir
Il y a des nuits
qui ont la gueule
plus grande que d'autres
qui mâchent les animaux
et vomissent de la pluie
Il y a des nuits de peu
où foetus de tornades
font danser quelques feuilles
arrachent quelques pétales
et rentrent dans le
terrier du ciel
Des nuits profondes
comme des plaies béantes
dans lesquelles on pourrait glisser
6 milliards de doigts
6 milliards de peines
6 milliards de haines
Il y a autant d'hommes
sous ces nuits
les coeurs en bandoulière
la fatigue dans les mains
Des hommes tout en bas
petits jouets pour les nuits
pions qu'elles dirigent
entre les flaques
Il y a une nuit pour
chaque homme
une seule lune
pour chaque nuit
autant de trous noirs
que de verres brisés
dans les ruelles
Plusieurs mots
pour chaque nuit
plusieurs morts
plusieurs corps
Des nuits sans oreilles
sans caresses
sans couvertures
Et le sommeil ressemble
à une carcasse de voiture
infestée de rats
inondée de froid
Il y a des nuits aveugles
qui marchent sur les étoiles
et dont on voit
les plantes de pieds
saigner
Guillaume Siaudeau